Je ne sais pas si ce portrait a sa place sur mon blog.
Mais il dépeint en profondeur qui je suis ; il est le résultat d’un questionnement poussé sur plusieurs années.
Allons-y… par contre, si vous n’aimez pas la lecture, désolé mais c’est un peu long...
Je me suis toujours sentie différente.
Du plus loin que je me souvienne, ma scolarité a toujours été subie : je n’étais pas comme mes camarades. J’étais à part dans la cour de récréation, très souvent seule ou tout au plus avec une unique copine, et ça ne s’est pas amélioré en grandissant. Les déménagements et changements d’écoles n’ont pas non plus arrangé les choses… Je me suis toujours demandé comment les autres nouaient des liens, comment ils faisaient pour se retrouver en groupes. Même encore actuellement, les gens sont souvent source de tension pour moi, je ne sais pas comment les aborder, parfois j’en fais trop, et parfois j’en fais trop peu, mais j’ai toujours l’impression d’être à côté de la plaque. Un premier contact peut très bien se passer, et puis la fois d’après, je ne sais plus quoi dire… j’ai le sentiment que personne ne peut comprendre ce que je ressens… mes centres d’intérêts sont assez peu communs, surtout pour une fille… Et puis je rejette facilement tout ce qui est souvent populaire parce que ça ne m’intéresse pas, par exemple les chansons qui passent à la radio, les émissions de variété, le football … Je ne regarde pas la télévision "classique", mais quand j'en vois un aperçu sur les émissions "zapping" proposées sur Youtube, je trouve ça extrêmement médiocre : des télé-réalités où les protagonistes ont des QI d'huitre (désolé les huitres!), des émissions où des gens chantent et le public tape dans ses mains (tout le monde il est heureux, youpi), des émissions affreuses de personnes qui en jugent d'autres sur leur apparence, leurs vêtements, ou même leur propre mariage! Alors je sais que toutes ces émissions plaisent beaucoup, c'est là que je me dis que je ne suis pas comme les autres. Un jour ma belle-mère s’est même fâchée contre moi car je ne connaissais pas «Danse avec les Stars », alors qu’elle voulait en parler ! Elle me disait que je pourrai regarder, car ça fait partie de la culture générale! Ça fait plusieurs années, et j’avoue que je n’ai pas encore éprouvé le besoin de combler cette lacune !
Lorsque j'étais en CE1 / CE2, j'avais une amie. Comme j'étais arrivée en cours d'année, elle m'avait accueillie : elle allait facilement vers les autres, en particulier lorsque ceux-ci étaient seuls. Elle m'avait présentée à son groupe de copines, et c'est l'une des seules périodes de ma vie où j'ai été intégrée. J'adorais cette fille. Quand j'ai déménagé 800 km plus loin, je n'ai jamais retrouvé quelqu'un comme elle.
Pourtant, il y a des personnes qui m’attirent. En général, ce sont des personnes cultivées, drôles et ouvertes d’esprit. J’ai eu des amies dans ma vie… mais rarement plus d’une à la fois, et elles peuvent se compter sur les doigts d’une main : quand j’aime, je suis entière et exclusive. S’il m’arrive un truc, j’ai envie de courir le raconter à mon amie ! Mais j’ai appris qu’il fallait être modéré dans ses sentiments. Les gens ont plein d’amis, je ne sais pas comment ils font. Des copines, oui ; mais une amie, c’est comme un amour, ça se trouve pas à tous les coins de rue ! Pourtant, même l’amitié est compliquée : je peux facilement me sentir trahie si j’ai l’impression que la personne n’éprouve pas la même chose que moi, ou qu'elle n'est pas toujours sincère dans ses propos…
L'anxiété et la "timidité" ont toujours fait partie de moi. Quand j'avais 6 ou 7 ans, il y avait cette dame, Mme C, qui surveillait la cantine. Souvent, elle prenait mon petit visage entre ses longues mains ridées et s'exclamait : "elle est saaaage comme une image !" Mais non, je n'étais pas "sage" : j'étais figée, complètement terrorisée, car cette femme me foutait les j'tons en hurlant dans le réfectoire pour demander le silence... Avec du recul, je trouve amusant que le fait que je sois en permanence "pétrifiée" soit pris pour de la "sagesse"... Au collège aussi on se moquait de moi comme ça (parmis d'autres joyeusetés) : on me disait que je ressemblais "à une petite fille sage", et qu'il ne me manquait que les petits souliers vernis...
Je me sens bien dans la nature, auprès d’animaux ou dans les bois. Lorsque j’étais enfant, j’y passais des heures à explorer, faire des cabanes, grimper aux arbres, ou tout simplement rester là, au beau milieu de la forêt. Je faisais même parfois « le mur » la nuit pour aller me promener là-bas ! Je peux passer de très longs moments sans m’ennuyer à écouter le vent qui fait murmurer les feuilles, à percevoir tous les bruits de la nature, le chant des oiseaux, à surprendre un animal de passage, à marcher pieds-nus dans l’herbe, à observer une rivière… c’est là que je suis heureuse, car tout est calme et je ne me sens pas seule.
Les animaux ont une place importante dans ma vie. J’ai toujours été attirée par ces petites bêtes, et mes parents, émus de l’amour que je leur portais dès mon plus jeune âge, m’avaient pris un petit chat… J’ai toujours eu des compagnons à quatre pattes, à toutes les époques de ma vie. Sauvage ou domestique, chaque animal est un être qui éprouve des sentiments, fait des rêves quand il dort, aime ses petits… bref, ils ne sont pas différents de nous. Quand j’adopte un animal, il fait partie de ma famille pour la vie. Et quand cet être, si petit soit-il, me démontre de l’affection, je suis émue et honorée, car ils ne mentent pas, leurs sentiments sont purs. A force d’observations, j’arrive à communiquer avec eux, il y a un lien étroit qui se tisse entre nous. J’ai même parfois l’impression que je peux traduire exactement ce qu’ils pensent ou ressentent… alors pourquoi est-ce si difficile d’entrer en relation avec mes semblables, les humains ? Peut-être parce qu’ils possèdent des mots qui peuvent déformer, parfois volontairement, leurs pensées et leurs sentiments ?
Lorsque j’étais en classe de troisième au collège, on nous avait fait faire un genre de profil psychologique pour nous aider à nous orienter. J’avais 19 sur 20 en « artistique » et en « nature »… oui, mais que faire avec ça dans ce monde? Une des valeurs qui arrivait ensuite était « altruiste » avec 14 sur 20. Et en effet, aussi étrange que cela paraisse, j’aime les gens (sauf ceux qui font du mal), la diversité et la richesse des personnes, je ne supporte pas que quelqu’un puisse souffrir, je tends à aider mon prochain s’il est dans le besoin. Je suis devenue Auxiliaire-Puéricultrice, alors j’ai côtoyé de très nombreux parents qui semblaient m’apprécier beaucoup… mais était-ce vraiment moi, ou mes compétences et mon amour des bébés et jeunes enfants ? Comment expliquer que j’avais une vie sociale très remplie, en tout cas sur un plan professionnel, et que par ailleurs je sois incapable d’entrer en relation plus personnelle avec tous ces gens ? « On reste en contact ! » disaient-ils souvent. Mais la poursuite de la relation ne peut pas venir de moi, peut-être le sentent-ils. Peut-être n’a t-on plus rien à se dire si le sujet n’est plus leur enfant. Peut-être est-ce une manière moins violente de se dire aurevoir.
Je suis une altruiste solitaire.
De toute manière, inviter ou recevoir une invitation est aussi source de stress pour moi. Si je suis invitée, je ne sais pas comment me comporter, je ne vais pas être naturelle, quelque chose en moi sera sous tension et je ne sais comment je génère une espèce d’aura de malaise… vous savez, il y a des gens, quand vous êtes avec eux, vous vous sentez bien, l’atmosphère est « calme », le silence n’est pas pesant ; eh bien avec moi c’est tout l’inverse ! Bon, à part avec mes proches et heureusement… Et puis si c’est moi qui invite (si, ça m’arrive !), j’angoisse plusieurs jours à l’avance : « Il faut que j’aille faire des courses. Qu’est ce que je vais préparer à manger ? Est-ce qu’il y aura assez de nourriture ? Pas trop peu ? Est-ce que ça va être bon? Il faut que je pense à ceci, à cela... » Pourtant, je n’invite pas d’inconnus, c’est juste ma famille ! Bref, je me prends bien la tête et j’ignore pourquoi, je suis comme ça.
Au début, « ne pas être comme les autres » m’affectait beaucoup ; je ne comprenais pas pourquoi personne ne me disait « Bonne Année », pourquoi personne ne connaissait ma date d’anniversaire, pourquoi personne n’avait besoin de moi.
A 15 ans, je n’avais pas encore saisi qui j’étais. J’étais mal dans mes baskets, je me sentais la cible de moqueries au lycée, comme à la maison où mes parents aussi souriaient de ma « naïveté ». J’étais très timide, voire « effacée » comme l’écrivaient les professeurs sur mes bulletins de notes... Ma mère me traitait de « cruche » ; mes parents trouvaient que j’étais trop rêveuse, et me reprochaient parfois de m’enfermer dans ma chambre pendant des heures . En effet, je dévorais des bouquins : j’ai lu tout ce qui pouvait concerner les chevaux, les loups, ou les chats (romans, revues, encyclopédies), et plus tard dans l’adolescence je me suis projetée dans la littérature fantastique avec tous les « Stephen King »...
N’ayant pas encore trouvé le mode d’emploi des relations sociales, c’est dans cette période que je me suis confiée à une personne que je sentais proche de moi. Bien que nos emplois du temps étaient peu concordants, je ne pouvais pas être souvent avec elle (et puis elle avait d’autres amies), mais je l’aimais beaucoup et elle est restée mon amie de longues années après. Je lui ai dit :
« Tu sais, c’est difficile pour moi : d’un côté j’observe tous ces gens qui sortent, vont en soirée, font la fête sans retenue… de l’autre, il y a des gens en plus petits groupes qui aiment faire des sorties plus calmes, s’éclater, ou faire de longues discussions et sortir au cinéma… je ne sais pas à quel monde j’appartiens ! »
J’avais essayé d’observer tous ces gens. Pour comprendre ce qui clochait chez moi.
Comme si je devais absolument rentrer dans une case.
Être comme les autres pour ne pas à avoir à justifier ma différence.
Être comme les autres pour passer inaperçue.
Elle a réfléchi un tout petit instant. J’avais toujours admiré chez elle cette écoute et cette vitesse de réflexion. Et elle m’a répondu tout simplement :
« Tu sais, tu n’as pas à vouloir te rattacher à un monde, tu as ton propre univers. »
Cette petite phrase a tout chamboulé en moi.
Comme si j’étais enfin quelqu’un après des années d’errance.
Comme si j’avais le droit d’être différente.
Bien longtemps après, quand le doute me prenait, je pensais à ces quelques mots qui m’avaient aidé à y voir plus clair sur ma personnalité.
Ces quelques mots qui m’ont aidé à me forger.
Oui, je ne suis pas comme la majorité des gens.
Oh, bien-sûr, cela n’a pas effacé du jour au lendemain la faible estime de moi-même : encore régulièrement, je manque de confiance en moi. Et puis tout n’a pas marché « comme sur des roulettes » avec cette prise de conscience : à 17 ans, je me suis sentie tellement incomprise par mon entourage proche suite à un évènement de ma vie, que j’ai voulu en finir avec tout ça… mais c’est là une autre histoire.
Cette découverte n’a pas non plus atténué mon sentiment de solitude, mais ça m’a aidé à m’accepter.
Et sur le chemin de l’acceptation, la louve solitaire a trouvé son Alpha.
Et nous avons créé notre petite « meute » comme je me plais à l’appeler. Deux louveteaux rock’n roll et atypiques. Nous sommes à part, mais ensembles.
Les années passant, j’apprends à accepter que je suis différente. J’apprends à m’aimer, j’affine mes goûts et mes passions, j’arrive aussi à détecter et à éviter ou apprivoiser tout ce qui est difficile pour moi. Je fuis la grisaille des villes, les klaxons et sirènes, les travaux, les marteaux-piqueurs, les camions, le flot incessant des voitures. Je fuis les lieux bondés de monde (supermarchés et galeries commerciales, heures de pointe, foule...), donc j’essaie de faire mes courses tôt, par exemple. Quand je parle de « fuite », je ne parle pas forcément en termes physiques : ma fuite peut être spirituelle !
Je suis facilement stressée, j’ai besoin de repères. Aller dans un lieu inconnu tient de l’excursion. Je vais passer 150 ans à étudier le trajet, je vais angoisser à l’idée de ne pas savoir où me garer, je vais avoir peur de ne pas trouver le bon endroit, la bonne salle, les bonnes personnes. Et je me demande : quelle attitude adopter dans ce lieu ? Comment font les autres ? C’est comme si j’avais besoin d’un mode d’emploi pour savoir comment me comporter.
Je suis aussi faite de contradictions.
J’aime la routine et l’aventure. Être grisée par la vitesse de mon vélo en descendant une colline sur cette route abandonnée de campagne. Chausser mes baskets et partir pour une randonnée dans une contrée inconnue. Faire une exploration nocturne, quand tout est calme et endormi...
Mais si quelqu’un venait me rendre visite sans prévenir, je risquerais d’être décontenancée (et puis ça tombe toujours au pire moment)!
Personne ne me souhaite la « bonne année » ? Tant pis ! Car ça y est, j’ai appris que j’aimais cette solitude dans laquelle je me sens sereine. Et puis je ne saurais que faire d’une vie sociale bruyante et/ou envahissante ! Pourtant, je suis heureuse de voir ma famille de temps en temps, mais j’ai maintenant clairement identifié chez moi le besoin de m’éloigner de tout et tous à certains moments. Même parfois lorsque je suis avec les êtres qui comptent le plus au monde pour moi : ma petite meute.
J’ai souvent peur de passer des appels téléphoniques. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Peur de déranger, de ne pas savoir m’expliquer, peur de ne pas savoir à qui je m’adresse… C’est un peu différent avec la famille, mais c’est vrai que je ne pense pas à appeler, car en fait je ne sais pas quoi raconter, j’ai du mal à synthétiser les évènements…
Et puis, il faut manipuler la parole et les mots… j’éprouve de la difficulté à m’exprimer oralement. En public ou même face à une seule personne, je ne sais pas choisir mes mots, je suis maladroite, je n’arrive pas à exprimer correctement ma pensée, je n’arrive pas à suivre un fil directeur, je m’éparpille, et j’oublie mon propos initial... L’écrit est bien plus facile pour moi : je peux revenir en arrière, réfléchir au sens des mots tranquillement, corriger jusqu’à ce que j’arrive à peu près à faire passer ce que je veux dire.
Il est arrivé à de nombreuses reprises dans ma vie que j’aie vexé quelqu’un bien malgré moi… parce que mes silences sont perçus comme de la froideur (alors que c’est juste que je n’ai rien à dire ou que je suis mal à l’aise), ou parce que j’ai été maladroite dans mes paroles que les gens interprètent ou y ou voient des sous-entendus (qui ne sont absolument pas intentionnels étant donné mon incapacité à réfléchir en même temps qu’une expression orale qui me demande beaucoup).
Et puis si j’exprime mon point de vue et que mon interlocuteur est prêt à en découdre furieusement sur une opinion contraire, je vais laisser tomber. Je pense être à l’écoute et avoir l’esprit ouvert, mais je n’ai pas envie de joutes verbales, je ne suis pas du tout faite pour ça. Je ne veux pas me battre, les gens pensent ce qu’ils veulent, je n’aspire qu’à ma tranquillité.
« Elle est gentille mais elle ne parle pas » disait dans mon dos une élève infirmière lors de mes stages en puériculture (comme si le fait de ne pas parler pouvait me rendre sourde)… Je ne sais pas ce que se racontent les gens, j’ai du mal à m’intégrer… Alors je suis seule, mais ce n’est pas vraiment parce que les gens ne m’aiment pas, c’est juste parce que je les laisse indifférents. Dans notre société, il semble important d’échanger…
Pourtant, de l’extérieur, je pense que rien ne se voit. J’essaie de donner le change. Peut-être que personne n’imagine tout ce qui se joue dans mon petit cerveau. A présent, je me connais et je ne vais pas chercher à tisser de liens quand je fais des rencontres sociales. Et du coup ça se passe mieux... quand j'arrive à garder le contrôle. Sinon, si je me laisse aller à ma vraie nature, je créé des malaises, ou bien les gens ne m'écoutent pas, j'ai l'impression que je les ennuie royalement dès que j'essaie de raconter quelque chose. Alors je garde pour moi qui je suis et ce que j’aime.
J’ai bien essayé de partager mes passions, mais en général mes interlocuteurs ne comprennent pas. Même quand ils ont l’esprit ouvert, mes centres d’intérêts ne sont pas très courants. Oh, si je parle de nature, oui, ça peut passer, même si le sujet peut sembler niais… Mais si je parle de ma passion pour la science-fiction ou le médiéval-fantastique, c’est rare qu’on me suive. Ce ne sont pas des choses qui intéressent « Monsieur Tout-le-monde », et encore moins côté féminin. Je suis une rêveuse, et tous ces univers m’aident à m’échapper. Je peux plonger dans un bouquin, un jeu vidéo, un film, ou une série, peu importe le support tant que je voyage sur mes thèmes favoris. Et puis je suis aussi passionnée de guitare, mais mon truc c’est pas Jeux Interdits, non, j’aime le rock, le style metal, la guitare électrique qui crie ses solos et finit en larsen… J’adore le Melodic Death Metal, j’aime planer en essayant de jouer mes riffs préférés sur l’une de mes guitares chéries, j’aime aller dans des concerts voir tous ces groupes souvent nordiques (ce sont d’ailleurs les seuls moments où je peux accepter d’être dans une foule sans m’énerver)… Mon propre père appelle ça « de la musique de cinglés », lui qui aimait voir sa petite fille jouer du piano classique dans son salon, autrefois… alors quant à être comprise et acceptée d’étrangers, c’est peine perdue.
Et puis, même si j’évoquais le jeu vidéo, une personne lambda pourra peut-être penser « Candy Crush Saga » alors que je voudrais parler d’aventures épiques, de Jeux de Rôles, de survie, de tirs ou de combats à l’épée… Comment échanger avec quelqu’un dont les films préférés sont « Dirty Dancing » ou « Titanic » quand les miens sont « Lord of the Rings » ou « Total Recall » ? Comment ne pas me sentir différente quand les gens à la Fac voulaient tous regarder « Beverly Hills » en salle télé alors que je rêvais de suivre « Highlander » sur l’autre chaîne ? Pourquoi évoquer l’euphorie que j’éprouve à assister à un concert de guitares metal et de chant guttural quand mon interlocuteur ne comprend pas de quoi je parle ? Pourquoi vouloir parler d’arbres et de botanique quand pour l’autre le bonheur naît du shopping et de l’acquisition de nouvelles choses ? Comment parler à des personnes du plaisir que je ressens à faire des choses simples si l’autre rêve de sauter dans un avion pour aller en vacances dans ce pays à l’autre bout du monde ?
Voilà.
Tout ça c’est moi, mon récit pourrait s’arrêter là.
J’ai appris à me connaître et à accepter ma différence, à présent je suis heureuse, « Happy End ».
Mais la vie a fait que, bien qu’ayant travaillé plusieurs années avec de jeunes enfants autistes, je doive m’intéresser beaucoup plus personnellement à ce sujet. Et comme à mon habitude, quand un sujet me touche, je veux tout connaître dessus. Livres, vidéos, articles, réseaux sociaux, émissions, j’explore tout. Et j’ai découvert énormément de choses que j’ignorais.
Pour moi, une personne autiste se remarquait forcément. Évidemment, parce que j’ai travaillé auprès d’enfants de moins de 6 ans chez qui les stéréotypies étaient visibles (et du coup, ils étaient « faciles » à diagnostiquer). Mais les symptômes de l’autisme sont bien plus larges que ça et la connaissance de ce trouble neuro-développemental ne cesse d’augmenter au fil des années. On ne parle d’ailleurs plus « d’autisme » mais de « Troubles du Spectre Autistique », tant cela peut se manifester sous bien des formes.
Enlevez-vous de la tête qu’une personne autiste est « renfermée », qu’elle se balance d’avant en arrière, ou fuit systématiquement le regard. Ce n’est pas non plus forcément un petit génie savant ou une personne « attardée » (même s’il peut y avoir des déficiences intellectuelles liées dans certains cas). Tout ceci sont des considérations anciennes, mais qui ont la peau dure dans l’esprit de beaucoup. L’autisme, c’est juste un fonctionnement différent du cerveau. Un fonctionnement « atypique ».
Voici la définition du site « Autisme Info Service » : L’autisme représente un ensemble de symptômes. Ces symptômes varient d’une personne à l’autre. Ils peuvent être plus ou moins présents et même évoluer au fil du temps. Chaque personne autiste est donc différente. L’utilisation du mot « spectre » permet d’intégrer toute la diversité des troubles et de signifier l’évolution possible de personne au sein de ce spectre.
Il y a des autistes parmi nous, mais nous ne saurions pas dire qui. C’est invisible.
Les études sur ce trouble ont porté plus largement sur les garçons, parce qu’apparemment l’autisme féminin est plus difficile à déceler et se manifeste différemment : une femme autiste camoufle ses traits plus ou moins consciemment, ou ceux-ci sont masqués par des symptômes associés plus répandus.Je ne suis pas assez compétente pour éclaircir ici les spécificités de l’autisme au féminin, mais si le sujet vous intéresse, il y a quelques articles sur le net ; les recherches sont en cours.
Venons-en maintenant au sujet.
Au cours de mes lectures, je suis tombée sur le schéma de cette petite pieuvre… et cela a fait comme un tilt en moi. J’ai presque eu l’impression que quelqu’un avait dessiné grossièrement tout ce que je viens de décrire me concernant :
… à quelques bulles près, je coche toutes les cases de cet exemple d’autisme féminin. J’aurais même pu écrire en partie l’une des bulles, car c’est le sous-titre de mon blog « Nature et Geek ».
Je n’arrive pas à y croire.
Alors finalement… il se peut que je sois comme d’autres personnes. Ma différence est une normalité pour quelques autres.
Il y a des tests sur le site « Comprendre l’Autisme » ; je décide d’en faire un...
Et le résultat est : « vous êtes très probablement aspie » (sous-entendu autiste Asperger).
Voilà.
Je n’en reviens pas. Mon passé prend un éclairage nouveau.
Suis-je autiste Asperger ?
De ces profils dont on sait maintenant qu’ils peuvent se fondre dans la masse ?
Pour mon Alpha de mari, je ne suis pas du tout autiste, mais je me mets des barrières au fil des années. Pour moi, ces « barrières » sont justement la matérialisation de l’approfondissement de la connaissance de ma personne. Vous savez, quand je disais que j’apprenais à m’aimer ; eh bien, j’apprenais aussi à me respecter, et me mettre des gardes-fous là où je me sens en difficulté, c’est une façon de prendre soin de moi…
A ceci, le psychologue du coin de la rue pourrait rétorquer qu’il vaut mieux affronter ses difficultés. Pour ma part, même si le cheminement est long, je préfère trouver mon propre équilibre seule, c’est ce qui me mène au bonheur.
Alors… qui suis-je vraiment ?
Est-ce que je suis dans le spectre de l’autisme ? Ou pas du tout ?
Eh bien, on ne le saura probablement jamais...
Je pourrai essayer d'aller faire un diagnostic, mais... pour quoi faire? Ce n’est pas important : si mon enfance et ma jeunesse ont été socialement difficiles du fait de ce décalage permanent, à présent je me connais bien, et poser des mots sur ma personnalité ne changera pas qui je suis. Et puis, autiste ou non, je n’ai pas envie de revendiquer ma différence… je ne parle quasiment jamais de qui je suis à l’intérieur, mais à présent, même si je le faisais je ne prononcerai pas le mot d’autisme. Vous seuls, lecteurs, êtes dans la « confidence » de ce questionnement !
Mais j’avais envie de partager toute cette introspection.
Et je reste la même.
Et puis, au fil du temps, après réflexion, mon opinion se modifie un peu : je me dis que si je croise un jour le chemin d'un spécialiste en TSA, j'irai peut-être le rencontrer par curiosité...
Certains pourraient penser que cet article est une façon d’attirer l’attention sur moi. Alors, c’est qu’ils n’auront pas bien lu mon analyse ! C’est pas grave, je ne m’attarde plus sur les pensées des gens… Par contre, on peut dire que j’aime écrire, ça oui !
Je voudrais cependant présenter mes excuses auprès des personnes autistes diagnostiquées et qui rencontrent de véritables difficultés au quotidien, parce qu’il se peut que je n’imagine pas un instant ce qu’elles traversent...
Merci de m’avoir lu jusque là, d’avoir partagé mes galères et mes découvertes, et peut-être entrevoir un peu qui je suis.
« There is a place that holds the answer
Where nothing calls to be set free
It ends and it begins with utter silence
It holds what is better kept inside
(...)
I want to feel like I belong
I don't want broken promises »
(In Broken Trust – The Halo Effect)